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Le réseau social selon Yahoo?

On pouvait lire récemment dans la presse que Yahoo, par la voix d’un de ses porte-parole, avait affirmé que le portail est intéressé par le développement des réseaux sociaux. Le contraire aurait été étonnant. Yahoo a été le premier acteur « historique » de l’Internet à faire une proposition de rachat de Facebook. C’était en 2006, il a ensuite été suivi par Google et Microsoft.

Impossible pour ces acteurs « historiques » de ne pas avoir une stratégie réseau social. Depuis 3 ans, ce type de réseau est devenu le nouveau paradigme de l’expérience utilisateur Internet. C’est aujourd’hui le format par excellence des communications sur le Web, un peu comme l’association portail+pages persos, était le paradigme à la fin du siècle précédent (et oui nous avons changé de siècle). Tout acteur qui a pour ambition de devenir le point d’entrée principal (et de rétention) sur Internet se doit de faire évoluer sa proposition éditoriale pour prendre en compte la dimension sociale.

Ce qui surprend dans le succès de Facebook ces dernières années, c’est que, en dehors des flux d’activités, ce succès est basé sur des fonctionnalités et des contenus que les acteurs historiques offraient déjà à leurs utilisateurs.

A titre personnel, je dispose d’une adresse mail Yahoo depuis la fin des années 90. Je suis donc exposé depuis plus de 10 ans à l’évolution de l’offre de contenus de ce portail. Si on prend les applications les plus utilisées aujourd’hui sur Facebook, encore une fois en dehors du flux d’activité, Yahoo les propose toutes depuis plusieurs années: messagerie, publication de photos, page personnalisée, chat, gestion de groupes et de listes de diffusion, vidéos…

J’utilise massivement la messagerie Yahoo, mais en dehors de la fonctionnalité de gestion de liste de diffusion, pratiquée il y a quelques années, je n’ai utilisé que très ponctuellement les autres services. Sur plus de 10 ans, je n’ai utilisé qu’1 à 2 fois la fonction chat de Yahoo. Essentiellement parce que Skype est mon logiciel de chat favori, et que je conçois – peut-être cela changera-t-il sous l’influence de mon expérience avec Facebook – ma session mail Yahoo comme quelque chose de relativement privé, et qui n’a pas à être « partagé » avec mon réseau d’amis. Partagé dans le sens où, je n’ai pas forcément envie que mon carnet relationnel sache que je suis en ligne au moment où je lis mes mails.

Qu’est-ce qui explique donc que Facebook ait suscité un nouvel engouement pour ces services, alors que Yahoo en disposait avant? Si cela ne vient pas des contenus eux-mêmes, c’est qu’il s’agit d’autre chose. Facebook l’a emporté sur la scénarisation de tous ces contenus et sur leur intégration. Facebook, Frienfeed, Bebo, Twitter, ces services Web nouvelle génération, offre une manière nouvelle de scénariser les contenus Web et l’expérience utilisateur.

Ce qu’on apelle la dimension sociale, qui par bien des aspects est une dimension communautaire, existait bien avant 2004, l’année de l’ouverture de Facebook à tous. L’année 2000 a vu une explosion de sites communautaires, dont les guides de consommation basés sur des opinions et des avis consommateurs, tels que epinions.com ou dooyoo.fr, auquel j’ai collaboré. Il y a d’ailleurs a un retour en force de ces contenus communautaires, tous les éditeurs de sites ayant décidé d’exploiter les contenus générés par les utilisateurs (UGC). Le secteur du voyage est un des plus actifs sur ce créneau avec des sites comme voyazine.voyages-sncf.com, Bluenity, TripAdvisor, Routard, ou VibeAgent.

Comment se mettre au goût du jour pour Yahoo? Comme tous les autres poids lourds, il n’a évidemment pas attendu cette chronique pour penser et tenter de mettre en oeuvre une évolution de son menu éditorial. La tentative de rachat de Facebook était déjà une première réponse, maligne et réactive. AOL semble mener avec doigté une telle stratégie, à travers son rachat du réseau social Bebo et son intégration avec les services maison les plus populaires. Nous en parlerons plus tard.

En dehors du rachat/intégration d’un réseau social d’envergure, l’autre approche consiste à modifier la scénarisation des contenus sur le portail. Ceci implique une nouvelle hiérarchisation des services, des modifications ergonomiques et la capacité à ouvrir le portail sur toutes les innovations de l’Internet, y compris si elles viennent d’éditeurs tiers. C’est la stratégie appliquée par Google, après le constat d’un rapprochement impossible avec Facebook. Il se murmure d’ailleurs que Twitter serait la nouvelle cible du moteur de recherche.

En termes d’expérience utilisateur, Yahoo pourrait tenter par exemple d’activer automatiquement les sessions chat de ses utilisateurs, comme le font Facebook et Google Mail. C’est une manière de forcer la main des utilisateurs, qui pourraient protester, mais on peut faire le pari que le succès des réseaux sociaux de dernière génération contribue à modifier l’attitude des utilisateurs face à une telle situation.

Pourquoi Facebook est devenu votre logiciel de chat par défaut, et pourquoi MSN et Yahoo sont devenus ses principaux concurrents

Début avril 2009, cela fera un an que Facebook aura intégré la fonctionnalité de chat (tchatche en français) à sa plateforme. Ce qui pouvait ressembler, avant cette intégration, à un trombinoscope un peu évolué avec des fonctionnalités de mail interne est devenu alors un logiciel de messagerie instantanée intégrant des conversations protéiformes avec votre réseau d’amis et de contacts, dans un environnement qui regroupe les applications et les contenus les plus populaires de l’Internet.

Tous les éditeurs de messagerie instantanée, AOL, Microsoft (avec MSN), Yahoo, Skype et Google (Google Talk) ont dû tiré la langue. En effet, avec Facebook Chat, un nouveau concurrent arrivait sur ce marché déjà encombré, un concurrent armé de la croissance exponentielle de sa base utilisateurs, là où la base des acteurs « historiques » a tendance à faire du surplace ou à grossir de façon incrémentale.

La croissance de Facebook repose en partie sur la possibilité (inventée par d’autres et également utilisée par les autres réseaux sociaux) d’inviter d’un coup tout son carnet d’adresse, mail ou chat, à s’inscrire sur le site. Avec le développement de la fonctionnalité chat, c’est une partie de plus en plus importante des utilisateurs inscrits chez les acteurs historiques qui migrera ou dupliquera son usage de la messagerie instantanée vers Facebook. Surtout si Facebook trouve le moyen de permettre à ses utilisateurs, comme le fait Imo.im, de chatter avec des personnes inscrites sur des logiciels de messagerie concurrents. Un article de Techcrunch montre d’ailleurs comment Microsoft et Yahoo freinent pour le moment l’intégration de leurs logiciels de messagerie avec  ceux des concurrents.

Le but clairement affiché de ce réseau social est qu’on s’en serve pour interagir aussi bien avec ses proches qu’avec des clients, des fans, ou des entreprises, augmentant par là les possibilités de conversations instantanées de tous ordres, y compris au travail. En comparaison, les autres acteurs grand public viennent d’une culture où la messagerie instantanée est réservée à la sphère privée (famille, amis, etc.). Cela a des implications importantes sur les relations que les entreprises ou les personnes publiques développeront bientôt avec leurs « cibles ». On peut imaginer que telle personne publique ou entreprise pourra organiser un chat avec ses fans via Facebook. Parmi les nouvelles fonctionnalités de Facebook se trouve justement la possibilité pour les organisations et les personnalités publiques d’avoir accès aux mêmes types de fonctionnalités qu’un utilisateur lambda (chat, messagerie, invitation, vidéo).

Jusqu’à présent les entreprises passaient essentiellement par les sites de news de type Libération, Le Monde, ou Les Echos, pour organiser des chat à grande échelle en direction de leurs cibles; on peut parier qu’elles utiliseront de plus en plus Facebook pour ce genre d’événements.

Sur le marché de la messagerie instantanée, en termes d’utilisateurs inscrits, la hiérarchie est la suivante:

1. MSN – Live Messenger (environ 320 millions actifs)
2. Yahoo Messenger (plus de 248 millions actifs)
3. Skype (environ 309 millions enregistrés)
4. AOL (plus de 100 millions enregistrés)

Source: Wikipédia

En comparaison, Facebook ne compte aujourd’hui que 175 à 180 millions d’utilisateurs. Il est ainsi déjà devant AOL, mais derrière MSN, Yahoo et Skype. Cela dit, ces chiffres reflètent le nombre total d’utilisateurs inscrits, ils ne disent pas le nombre d’utilisateurs réellement actifs; par exemple combien utilisent le service au moins une fois par semaine.

Facebook étant devenue une des destinations les plus prisées au monde (il est dans le top 10 des sites les plus visités), on peut imaginer que le nombre d’utilisateurs actifs de son service de chat augmente lui aussi de manière exponentielle.

Dans une prochaine chronique, nous verrons si, en  réponse, MSN, Yahoo, Google, Skype  et AOL vont se transformer en réseaux sociaux.